Peut-on chipoter au Réveillon ?
Le coup de plume du réveillon : Choisir entre sa santé ou saboter la soirée …
30/12/16
L’épreuve est trop rude pour y survivre. Ne sortez pas la balance entre les deux tours de réveillons… Attendez plutôt 2017 et les bonnes résolutions.
Car, comme pour les élections, ou pour le militaire entre deux permissions, il faut savoir s’abstenir pour éviter les mauvaises surprises, après.
En théorie, du moins.
Car l’impitoyable affichage du pèse-personne, tel un miroir même pas déformant, nous renvoie notre image véritable, hurle notre faiblesse devant les buffets surchargés d’entrées, la surenchère des plats et la farandole indécente de desserts. Le tout copieusement arrosé du Saint breuvage évidemment, pour que ça glisse Alice, dans la goulotte entre deux bouchées, Albert il est fameux, ressers-moi un verre, y’a un goût de framboise.
Il ne vous aura pas échappé cette année (les media ont des modes comme ça, tels les étourneaux qui piaffent tous en même temps) que le ventre est notre deuxième cerveau. Ce que la sagesse populaire résume, laconique, d’un Quand l’appétit va, tout va.
Pour autant, il convient de le ménager, d’éviter les excès qui nuisent au bon fonctionnement de la tuyauterie tel un péage d’autoroute un dimanche soir, à la longue queue qui se tend, jusqu’à ce que la peau de tes roues pètent.
Ménager son estomac ? Cette blague !
Vous imaginez-vous en train de chipoter devant l’assiette joliment décorée et copieusement garnie par Sophie, votre hôtesse ? Elle qui a passé l’après-midi au fourneau après trois journées de cours intensifs à l’Atelier des Cuistots, pour apprendre à séparer les filets de poissons, monter la mayo à la main, cuire un soufflé-n’est-pas joué, qui ne joue justement pas les dégonflés dès qu’on le sort du four comme un footeux pitoyable se tortille sur le gazon.
Vous voyez d’ici la tête des autres convives, déjà prêts à en découdre la pique à la main devant le plateau de fruits de mer, tel des toréadors dans une arène chauffée à blanc par la musique festive et érotisante des bandas, avec ces saletés de bigorneaux qui même bouillis te narguent du genre tu peux toujours me l’enfoncer profond, tu n’obtiendras rien de moi , et pi c’est tout.
Ces gens, au demeurant normaux jusque dans leur volonté de rendre la soirée conviviale, vont vous haïr d’un coup, d’un seul. Et leur sentence est irrévocable…
Le Chipoteur (appelé aussi « Le chieur)
Car le chipoteur, c’est le gâte-sauce, la goutte de citron qui te fait tourner le bol fumant de lait chaud que tu t’apprêtes à déguster dans un élan régressif (mais assumé), un jour de pluie sans fin, quand la maison t’appartient, sans casse-noisettes pour te contrarier, la musique jazzy en fond sonore.
Le chipoteur, comme le buveur d’eau un jour de fête, c’est, en un mot, le chieur.
Sus aux victuailles, aux breuvages festifs et dansons pour la bonne cause…
Alors, tant pis! Sus (suce) aux huitres, qui finiront de réciter leurs dernières volontés glougloutantes dans notre estomac encore vivantes, haro sur le saumon bio fluo shooté aux enzymes, banzaï sur le foie gras de Hongrie, sur les endives du Nord (les endives ? Non c’est une erreur, là…).
Haro sur les viandasses qui avant Noël caquetaient, meuglaient, ou cancanaient gaiement avec leur 1200 congénères de camp de détention.
Sortons les machettes pour couper en deux le bûcheron à l’air niais piqué sur la bûche glacée, lisse comme la peau de tata Sonia qui est encore repassée entre les mains avides de son chirurgien esthétique, non, Tata ne souris pas, j’ai trop peur que ça craque…
Baffrons en cœur, mes sœurs et mes frères de ripaille, car pour fêter le nouvel an, il est permis de danser. Et donc d’éliminer ces infâmes calories qui nous plombent la balance et le moral.
Et puis, à 0h00, clamons en chœur dans les vapeurs d’alcool, Bonne année 2017, d’un air joyeux, pouet-pouet, cotillons et serpentins, pour conjurer le mauvais œil, car en notre for intérieur, on sait bien que c’est pas gagné d’avance pour 2017…
Bon réveillon !
Michel Lenoir
C’est gratuit
